Changement climatique : LES ROTARIENS S’IMPREGNENT DU PHENOMENE
Alors qu’ils ne participent qu’à seulement près de 3% aux émissions de gaz à effet de serre, principale cause du dérèglement du climat, les pays africains en subissent les plus graves conséquences
Qu’est-ce la COP ? Quel est l’impact des changements climatiques sur notre vie ? Qu’est-ce le continent africain en général et notre pays en particulier peuvent attendre de la prochaine COP qui se tiendra en novembre prochain à Marrakech au Maroc ? Ce sont quelques questions parmi tant d’autres, auxquelles s’est prêté Seïny Nafo, expert en négociation climatique et, plus encore, président du groupe des négociateurs africains sur le climat, fraîchement élu en décembre 2015. C’était lors de la réunion commune des clubs du Rotary international district 9101, tenue jeudi dernier au Grand hôtel de Bamako, sous la houlette de Fousseyni Doucouré, président du Rotary club international district 9101, et en présence d’une soixantaine de membres de l’association.
Le conférencier a tout d’abord traduit l’acronyme anglais « COP » : la Conférence des parties à la convention cadre des Nations unies sur les changements climatiques. Celle-ci s’est tenue pour la 21è fois à Paris, du 30 novembre au 12 décembre 2015, d’où l’appellation de COP21, précise l’expert. C’est la première fois que les parties, composées de 196 pays du monde, parviennent à un accord. Quelle est la nature de cet accord ? Seïny Nafo constate que loin de satisfaire toutes les attentes, il prend cependant en compte les principales préoccupations des pays africains qui sont les plus touchés par les effets néfastes des changements climatiques.
En effet, c’est la situation géographique du continent africain (entre les 2 tropiques) et sa vaste superficie qui le rendent particulièrement vulnérable au phénomène. C’est pourquoi, lors des négociations de Paris, les Africains voulaient une feuille de route très précise à travers un accord ambitieux, équitable et universel qui mentionnerait un soutien concret basé sur le financement des projets d’adaptation. Le caractère ambitieux de l’accord pour les Africains se traduit par une augmentation limitée de la température globale de la terre en dessous de 2°C. Sinon, à déjà 2°C, le continent se réchaufferait 5 fois plus que les autres régions du monde et perdrait chaque année, 7% de son taux de croissance, prévient l’expert.
Ce chiffre alarmant rivalise malheureusement avec des paradoxes qui sont typiquement africains, relève le patron des négociateurs africains. Avec le plus grand potentiel du monde en matière d’énergies renouvelables (solaire, éolienne, biomasse, etc.), 650 millions de personnes, soit plus de la moitié de la population de notre continent, n’a pas accès à l’électricité. D’où l’appellation « continent noir » de l’Afrique, sans aucune référence à la couleur de la peau, ironise le conférencier.
Alors qu’ils ne participent qu’à seulement près de 3% aux émissions de gaz à effet de serre (GES), principale cause du dérèglement du climat, les pays africains subissent les plus graves conséquences (sécheresses endémiques, baisse de la pluviométrie, catastrophes naturelles, etc.). Pour faire face à tous ces défis auxquels l’accord de Paris ne donne pas une réponse claire, Seïny Nafo a dévoilé la stratégie de son équipe qui se projette déjà sur les travaux de la prochaine conférence (COP22) prévue à Marrakech.
EN DESSOUS DE 2°C. Il s’agit d’abord de tout faire pour que l’accord de Paris soit signé par le maximum de parties afin de pouvoir se concrétiser. Le groupe s’attellera à ce que les contributions nationales, c’est à dire les propositions faites par les pays parties à l’accord (196) de réduire leurs émissions de gaz à effet de serre d’ici 2020, soient respectées pour maintenir l’accroissement de la température globale en dessous de 2°C.
Les derniers efforts seront concentrés sur la mobilisation des ressources financières promises pour financer les mesures d’adaptation en Afrique. Car, déjà insignifiante, la somme 100 milliards de dollars (sur environ 3000 milliards de dollars nécessaires) que les pays industrialisés, principaux émetteurs de GES, ont promis de verser chaque année aux pays pauvres pour s’adapter aux changements climatiques, depuis la conférence de Copenhague (Danemark) en 2009, ne dépasse pas aujourd’hui les 10 milliards de dollars.
Impressionnés par tout ce qu’ils ont appris sur le phénomène de la variabilité climatique et ses conséquence sur le développement socio économique de nos pays, les Rotariens ont assailli le conférencier de questions illustrant les inquiétudes des populations maliennes qu’ils représentent pour être issus de tous les corps socio professionnels et de tous les âges de notre pays. Parmi les questions les plus intéressantes, on note le souci d’équité de l’accord de Paris pour les Africains, la tenue des promesses de financement. D’autres questions ont porté sur la politique du Mali en matière de protection de l’environnement qui est un droit constitutionnel pour les citoyens maliens, la lutte contre la déforestation et les actions concrètes à mener.
En réponse, le conférencier a affiché son optimisme sur l’effectivité de l’accord. Mais, insiste-t-il, « c’est à nous d’être vigilants et de rester concentrés sur nos objectifs ». En matière de protection de l’environnement, notre pays est le champion au plan institutionnel et juridique, assure Seïny Nafo. Mais, c’est la volonté politique qui fait défaut, regrette le chef des négociateurs pour l’Afrique. Pour lutter contre la déforestation qui menace notre survie aujourd’hui, il n’y a qu’une seule solution, c’est la promotion de la biomasse. Au lieu de subventionner des produits importés comme le gaz butane à hauteur de 20 milliards Fcfa par an, l’idéal serait d’investir dans la biomasse qui permet de réduire considérablement la pression sur les ressources forestières, estime Seïny Nafo. Chaque année, le Mali perd environ 500 000 ha de forêts.
« A la lumière de toutes ces informations, nous nous considérons aujourd’hui comme des ambassadeurs de l’environnement dans notre pays », a garanti Fousseyni Doucouré, le porte-parole des Rotariens qui n’a pas tari d’éloge sur le conférencier. « Votre pays et l’Afrique sont fiers de vous », a-t-il lancé avant d’assurer l’équipe de notre compatriote du soutient de son organisation.
L’intronisation de deux nouveaux venus dans le club, Ténin Diakité et Adama Diallo, a prolongé cette réunion commune des clubs. Rappelons que le Rotary club international fête ses 111 ans cette année. Il a été initié en 1905 par Paul Henry. Son objectif est de créer un réseau d’amitié à travers le monde entier, basé sur le volontariat. Sa devise est : faire don de soi au monde.
C. A. DIA
Source : Essor