Mme Diallo Oumou Modibo Keïta, directrice exécutive des JVE-Mali, Point focal MAB YOUTH : “Si rien n’est fait dans cinq ans, il n’y aura plus de Réserve du Baoulé”

Mme Diallo Oumou Modibo Keïta est directrice exécutive des Jeunes volontaires pour l’environnement JVE-MALI. Point focal MAB YOUTH MALI, elle en est la coordinatrice Afrique de l’Ouest. Mme Diallo Oumou Modibo Keïta est très engagée pour la défense de l’environnement. Elle tire la sonnette d’alarme sur les menaces qui pèsent sur la Réserve de Biosphère de la Boucle du Baoulé (RBBB). Depuis Glasgow où elle se trouve dans le cadre de la conférence internationale sur les changements climatiques COP 26, le Point focal de MAB YOUTH MALI appelle à des actions plus fortes pour préserver la Réserve du Baoulé qui risque de disparaître dans cinq ans si rien n’est fait. Entretien !

 

Que représente la Réserve de Biosphère de la Boucle du Baoulé pour le Mali ?

La Réserve de Biosphère de la Boucle du Baoulé (RBBB) est l’une des seules réserves naturelles de l’UNESCO au Mali. Elle joue un rôle important dans l’équilibre écologique du pays. Couvrant une superficie de 2.500.000 ha, la Reserve de Biosphère de la Boucle du Baoulé constitue l’une des plus grandes réserves de biodiversité, culturelle et touristique. Elle constitue une pluie d’oxygène. Elle est, de nos jours, l’un des derniers retranchements du peu qui reste de la faune et même de son habitat au Mali.

Selon vous, quelles sont les menaces qui pèsent actuellement sur cette Réserve ?

La RBBB fait face à différentes menaces. Il s’agit entre autres de la mauvaise pratique des feux de brousse, le surpâturage, les coupes anarchiques du bois, les défrichements et déforestations incontrôlés, les systèmes d’exploitation inadaptés, les agressions répétées contre les aires protégées, l’insuffisance dans l’organisation des différents acteurs, l’inorganisation dans le domaine de l’assainissement et des aménagements paysagers, la déforestation, la divagation des animaux, l’utilisation abusive des pesticides, l’insuffisance d’information sur les aspects liés à l’environnement, l’absence ou la non application de la législation, le non-respect des cahiers de charge dans les aménagements.

Parlez-nous du projet que votre organisation ambitionne de mettre en œuvre pour la sauvegarde de cette importante Réserve ?

MAB YOUTH MALI, l’association Jeunes Volontaires pour l’Environnement (JVE-Mali) et ces partenaires s’impliquent pour la résolution de ces problèmes environnementaux au sein de la Réserve du Boucle de Baoulé en se focalisant sur la sensibilisation et le renforcement des capacités communautaires à la bonne gouvernance des ressources naturelles. Il s’agit d’organiser des campagnes de communication sur cette réserve et le réseau MAB, visiter les écoles de certains villages riverains, effectuer des journées de reboisement sur les sites scolaires.

Nous voulons aussi organiser des campagnes de sensibilisation sur la gestion des ressources forestières en partenariat avec les exploitants forestiers du Mali, sur la prévention de la pandémie du COVID-19 et la situation sécuritaire dans la réserve.

Nous voulons également, à travers cette initiative, mener des réflexions sur l’implication des jeunes dans la gestion de la Réserve de Biosphère de la Boucle du Baoulé, afin qu’ils soient mieux outillés sur les menaces qui planent sur cette réserve.

Un autre objectif de ce projet est de réaliser une capsule vidéo et de photo relatant la situation actuelle de la Réserve de Biosphère de la Boucle du Baoulé, y compris les défis et enjeux de son occupation par des groupes extrémistes mais aussi démontrant sa diversité biologique. 1.280 personnes et neuf établissements scolaires seront touchés par le projet.

Ce projet aura-t-il des impacts sur les populations ?

Ce projet a pour vision de créer des projets communautaires dans les 22 communes riveraines du Baoulé pour décompresser la pression entropique en créant d’autres sources de revenus pour les populations.

Avez-vous obtenu des partenaires pour le financement de ce projet ?

Pour le moment, non. Toutes les activités à notre actif de nos jours ont été réalisées sur fonds propre.

Vous participez présentement au sommet sur le changement climatique. Qu’attendez-vous de ce sommet ?

Mes attentes sont celles des parties prenantes africaines. Sur la thématique “incitative au financement privé”, nous demandons à la Cop 26 d’établir un meilleur équilibre entre le financement public et privé et exiger que les entités de combustibles fossiles contribuent au financement climatique privé. Sur la question “Débloquez un financement climatique plus grand et plus inclusive”, la COP 26 doit être en mesure d’amener les pays développés à remédier aux insuffisances historiques de la finance climatique, d’augmenter le volume du financement climatique significativement, simplifier les mécanismes d’accès pour les groupes vulnérables et rendre le financement climatique plus prévisible.

Les parties prenantes africaines non parties attendent de la COP 26 d’améliorer l’accessibilité, le soutien et la transparence à travers certaines mesures. Il s’agit de permettre un accès plus direct et plus facile au financement climatique grâce à l’accessibilité d’un plus grand nombre d’entités en particulier les entités à accès direct au FVC, de fournir un soutien de capacité, de donner une plus grande autonomie aux pays bénéficiaires du monde en développement, améliorer la transparence et d’élaborer des lignes directrices accessibles sur la façon d’accéder au financement.

Elles demandent aussi à la COP 26 de mettre le focus sur l’adaptation et le financement des pertes et dommages. A ce niveau, elles veulent augmenter considérablement le financement de l’adaptation, rediriger et inciter les flux de financement de l’adaptation et consacrer un financement supplémentaire aux pertes et dommages exclusivement. Elles demandent également à la COP 26 d’accélérer l’action nationale par la prise, entre autres, des taxes nationales sur le carbone aux activités climatiques et l’allocation des portions du budget national à l’action climatique.

Quelle peut être la place de la Réserve de Baoulé dans la lutte contre le changement climatique si elle est mieux sauvegardée comme le préconise votre initiative ?

Elle est primordiale, un devoir moral pour la gestion future. Le Baoulé constitue la seule réserve de biosphère à nos jours pour le Mali couvrant quatre régions et vingt-deux communes riveraines. Si rien n’est fait dans cinq ans, il n’aura plus de Baoulé.

Propos récueillis par Chiaka Doumbia

Source : Le Challenger

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